Sur le principe de l’émission Vie ma vie sur TF1, Monsieur Etour Yves, professeur de mathématiques au collège de Charleville-Mézières, a décidé d’échanger son poste avec celui de Madame Tardi Sandrine, professeur des écoles dans une classe de CE1-CE2 d’une petite école de village du même département.

L’expérience devait se dérouler sur la journée entière. Le professeur agrégé avait pris soin de préparer sa journée avec sa collègue de primaire, laquelle n’a pas hésité à l’encourager et lui prodiguer de nombreux conseils.

C’est en ce jeudi 16 février que M. Etour a poussé le portail de l’École des Fleurs pour y transmettre son savoir. Après avoir effectué son service et  surveillé 10 minutes l’arrivée des élèves au portail, il confie avoir eu ses premiers doutes :

Je ne savais plus où donner de la tête. Lorsque je prenais le temps de répondre aux parents sur le jean déchiré de la veille ou le menu de la cantine, le petit  A…. me tirait la main en disant « maître, maître ». Je lui faisais signe d’attendre. J’ai finalement dû le changer car il a obéi et voulait simplement aller aux toilettes. Pendant que j’effectuais le change, j’ai entendu un CE1 crier des injures. Un ballon venait d’atterrir  sur les lunettes de Jean. Que diront ses parents au portail demain matin ?

En classe, il ne s’attendait pas non plus aux florilèges de questions toutes plus intéressantes les unes que les autres lorsqu’il eu fini d’expliquer la consigne des exercices de mathématiques.

I… : Maître ! Je prends quel stylo ?

A.. : Maîître

M… :Maître ! J’ai plus de place dans mon cahier !

A.. : Maîîître

N… :Maître ! C’est trop dur !

A.. : Maîîîître

J…. :Maître ! Ça veut dire quoi soustraire?

A.. : Maîîîîîîîîîîîître, Maîîîîîîîîîîîître,

Trop tard, le voilà parti pour changer une nouvelle fois le petit A… qui n’a pas pu se retenir une seconde fois.

Enfin arrive la pause salvatrice de midi. Ses chers collègues d’un jour prennent des nouvelles du courageux professeur de collège qui a osé s’aventurer dans la jungle du primaire. Ils ne tardent pas à l’inviter au Conseil des maîtres qui se déroulera un quart d’heure plus tard.

Notre collègue confie avoir assisté à un Conseil de haut niveau où l’on débat de sujets bien plus importants que la machine à café. Et pour cause, ici, point de machine à café.

C’est donc en serrant les dents qu’Yves retourne en classe sans avoir eu de café et de pause toilette. Il commence à comprendre le petit A…

Et c’est parti pour les sciences. Chouette, Yves adore ça. Mais il se heurte rapidement au souci de matériel. A l’école, pas de pipette, pas non plus de thermomètre ni de roue dentée… Il devra tenter de modéliser les concepts en recyclant pots de yaourt, cure-dents et autres objets du quotidien.

Le cahier du jour lui annonce ensuite la séance de sport, de quoi prendre un peu l’air. Mais voilà, c’est jour de pluie. Il va falloir improviser en salle de motricité. Manque de bol, elle est occupée par la classe voisine qui répète avec la chorale du village.  C’est la goutte de pluie qui fait déborder l’agrégé, Yves choisit de finir la journée en jouant au petit BAC, ça lui rappelle les grandes classes.

C’est enfin avec un gros mal de tête qu’il accompagne ses petits protégés au portail et remet le paquet de lessive sale aux parents de petit A… mécontents.

Heureux d’avoir fini sa journée, il espère ranger la classe tranquillement dans le calme et passer enfin se soulager aux WC mais c’est sans compter sur l’équipe des TAP qui investit déjà les lieux et lui demande de faire place nette rapidement.

La directrice vient alors à sa rencontre pour lui rappeler l’équipe éducative pour le petit A… Rendez-vous dans 10 minutes. Yves profitera sans doute de ce laps de temps pour se faufiler par la porte de service et s’enfuir.

La directrice note son absence lors de l’équipe éducative et regrette qu’il ne puisse rassurer les parents du petit A… sur la qualité de son enseignement et son sens inné de l’empathie. Sa hiérarchie a signalé sa disparition et est restée sans nouvelle de M. Etour pendant une semaine. En effet, au bout de 7 jours, il a enfin donné signe de vie en posant sa démission.

Son homologue Sandrine Tardi regrette cet incident. Elle confie :

J’ai essayé de le préparer à ce qui l’attendait mais on ne peut pas…

On ne peut réellement découvrir la journée d’un enseignant de primaire qu’en la vivant. Effectivement cela peut être un choc.

Elle avoue quand même que, de son côté, l’expérience avait été bénéfique et relaxante. C’était la première fois en 30 ans de carrière qu’elle arrivait à aller aux toilettes pendant ses heures de présence à l’école ! Elle s’est d’ailleurs dite prête à renouveler l’échange, au lycée cette fois-ci.